11 mars, 2014

5 techniques d'écriture tirées de How I met Your Mother


Une série télé comique décrivant des amis et leur vie sentimentale -y en a t'il un autre type?

 Après un petit marathon pour voir presque l'intégralité de la série "How I met Your Mother", je me suis plongé dans "Community". Je ne suis qu'à la seconde saison de Community, mais l'ensemble est jusqu'à présent bien plus construit que HIMYM. Les acteurs et les personnages sont meilleurs -enfin autre choses que le modèle des X amis blancs, trentenaires, de classe moyenne- , les blagues plus nombreuses et plus drôles, les intrigues plus originales.
Pourtant c'est HIMYM qui, par son format de narration -presque une recette-, est le plus instructif.





L'idée de tirer un enseignement presque philosophique d'un objet commun est une bonne idée comique. Internet regorge de billet d'humour du type "10 leçons de vie apprises d'un sandwich au beurre de cacahuète"; "5 règles de vie que j'ai apprit devant Twilight", etc...
C'est en espérant lire un article de ce genre qu'un jour j'ai cliqué sur un lien intitulé "Ce que m'a apprit Dungeon & Dragons sur la vie". L'article, dont j'ai oublié le propos précis, était complètement sérieux. Je m'attendais à des boutades du types "Il vaut mieux avoir une épée +2 qu'un dague rouillé", mais l'auteur donnait de véritable enseignement, sur l’intérêt des langues étrangères, de l'importance de l'amitié, etc -J'invente j'ai réellement oublié le propos de l'article-

Il se trouve que HIMYM donne aussi des pistes pour mieux écrire. Voila celles que je crois avoir découvertes:


1- Les rires enregistrés dissimulent les défauts

On reproche à la série les rires enregistrés illégitimes. L'illégitimité tient presque uniquement à la comparaison à "Friends" ou les rires sont dues aux tournages devant publique des épisodes. Durant HIMYM, personne n'a jamais rit. Les rires sont post-produits. On reproche ces rires artificielles, et c'est en partie pour cela qu'ils fonctionnent.
La raison principales pour laquelle ils fonctionnent, c'est notre particularité d'animaux sociaux. C'est ce qui fait que n'importe quel événement est plus vivace à plusieurs: un concert, une représentation de théâtre, un match de foot. On rit plus, on ressent plus d'émotion, on apprécie plus, si on est à plusieurs. Cela à une dénomination précise dans la sociologie, mais le propos ici n'est pas d'en faire.

On entend des rires, on admet, que si ce n'est pas drôle pour nous ça l'est pour quelqu'un. Dans "Community" quand une blague est mauvaise, sans rire enregistré, nous n'avons pas la même tolérance. C'est une mauvaise blague.
La seconde raison -peut être la plus importante- pour laquelle les rires enregistrés fonctionnent, c'est qu'ils servent de "bouc-émissaire". On ne les remarque vraiment que quand on ne rigole pas soi-même. La blague ne nous plaît pas, on entend les rires. Si on ne pardonne pas pour la première raison, on est en colère contre ces rires. On n'est pas déçu parce que la blague est nulle. On est déçu d'entendre des rires. La blagues est toujours aussi nulle. Mais on n'y attache plus d'importance.

En quoi cela sert quand l'on souhaite écrire. Je l'ignore. Mais j'imagine que si on veut faire passer un message comique, avoir un des personnages -secondaire, et pas forcément aimable- qui rigole -de la situation, du dialogue- doit lui aussi détourner l'attention du lecteur.
Soit on pardonne la mauvaise blague, parce qu'elle permet de démontrer la stupidité du personnage qui en rit. Soit on pardonne parce qu'on admet que cela a au moins fait rire quelqu'un -et qu'importe que ce soit un personnage de fiction-

Ted est rouge (bottes), la mère est jaune (parapluie), Robin est bleue (Cor français), Lilly est violette et Barney est gris (vêtements). Quel est le rapport avec les Bioman?


2-Ne pas forcer les lecteurs à apprécier un personnage

Le second reproche adressé à HIMYM: La mère -qui apparaît enfin en saison 9- est  ennuyeuse.
Surtout elle est parfaite, elle se fait ami avec tout les amis de Ted avant de le rencontrer, elle voit l'avenir, le vrai caractère des gens, elle est drôle, modeste et musicienne.
La perfection est toujours détestable. C'est une évidence en écriture, il est bon de le rappeler une fois de plus. La perfection la plus facile à faire passer est celle de l'intelligence. Mais uniquement en la balançant par une prétention démesuré ou une inaptitude social (James Bond, Sherlock Holmes, Hermione Grangé, Hercule Poirot, Ross Geiler). Dans HIMYM ce n'est pas un hasard si c'est le rôle de Ted. Le rôle qui ne fonctionne pas -la mère- a pour elle la perfection social, ou ce que l'on appelle depuis quelque années l'intelligence émotive. On attend toujours un livre qui fait apprécier un personnage à l'intelligence émotive. Mon propos est de dire que ça n'a jamais eut lieu et que c'est impossible: la perfection sociale annule le propos même d'un récit, qui naît du conflit de personnages. Un personnage qui met facilement tout le monde dans sa poche, sans vouloir conquérir le monde ou exterminer l'humanité, est forcément ennuyeux.

3-Les détails saugrenus sont essentiels pour la suite

Les bottes rouge, la chèvre, le cor, le parapluie. Ces objets apparaissent d'abord sans explications et prennent de plus en plus de sens. Ce sont des objets dont on se souvient à cause de leur particularité. Il est alors facile par la suite de leur donner du sens. De bâtir un récit autour de leur acquisition, ou de leur séparation. Le défaut est qu'il est essentiel de le faire. S'il n'y a pas d'explication à propos de l'ananas- trouvé sur la table de chevet- d'ici la fin de la série, les spectateurs seront déçus.
Les objets anormaux sont un moteur narratif fabuleux. On devrait toujours en mettre dans les romans, puis revenir sur ce qu'il signifient. C'est la magie de l'habitude. Un objet anormal heurte notre quotidien. Mais une fois que l'on a accepté son existence, le revoir, voir sa raison d'être est une satisfaction profonde.
En ce sens HIMYM a réussit quelque chose de magique en prenant un objet quotidien, avec juste une couleur anormale. J'ignore s'il y a moyen de faire plus efficace.



4-Plusieurs perspectives ne fonctionnent pas à l'écrit

Un des moteur de la série, et la ré-interprétation de ce qu'y vient d'être raconté. Un personnage raconte l'histoire, un autre corrige en insérant sa vision des faits. En cinéma, cette technique est éprouvée. On l' a vu dans Rashomon, film culte de Kurosawa pour cette raison. Plus récemment dans Fight Club.
En littérature aussi ça été fait bien sûr. Le premier est peut être Don Quichotte qui voit des géants où Sancho voit des moulins. Si la scène est mythique, elle ne fonctionne tout de même pas. Et ce n'est pas seulement parce que Cervantes est un auteur médiocre -génial pour son temps, médiocre globalement-
Cela ne fonctionne pas parce la lecture ne permet pas la même agilité mentale que la vision, et l’ouïe. L'on ne peut pas passer aussi facilement d'un point de vue à un autre, en lisant comme on peut le faire devant un écran ou notre investissement intellectuel est plus superficiel.
Les romans qui changent de points de vue, changent en général par chapitre -Il parait que "Game of Throne", que je n'ai pas lu, suit ce format-.

Découvert tard, mais après avoir lu 66% des livres de Palahniuk, je suis sous le charme


Même par chapitre je ne suis pas certains que le lecteur s'en accommode. Au final cela se résout comme de lire plusieurs petites histoires indépendante. J'ignore comment est le récit de Palahniuck qui a inspiré le film, mais l'auteur à officiellement reconnu qu'il préférait la version filmé de son livre. Peut être est par fausse modestie, peut être est-ce la preuve que le changement de perspective est plus crédible sur un écran que sur des pages.



5-raconter plusieurs histoires en même temps pour la coupure pub

Dans un épisode de 20 minute de HIMYM il y a deux coupure publicitaire. Heureusement sur internet (le lien donné au début de ce post) on peut voir les épisodes sans pub. Il n’empêche que l'on sait parfaitement quand l'original été coupé par la pub: L'histoire est bâti autour.
Avant chaque coupure on approche de la révélation d'un des "mystère" de l'épisode en cours. De mémoire ce sera le moment ou la femme dont Barney veut observer le corps va enlever son manteau; Le moment ou Robin va savoir si elle est cousine de Barney; Le moment ou Ted va savoir qui est la femme dans son lit; Pourquoi Marschall n'avait pas de pantalon au travail, etc...
Cette construction autour du suspens n'est possible que pour une unique raison: Il n'y a jamais une seule histoire racontée. On ne peut pas en 20 minutes créer deux mystères révélé après la coupure pub.  Le format est trop court.
C'est pour cette raison que chaque épisode se sépare en deux. En général une partie de l'histoire concerne Ted -avec Barney ou un autre- et son aventure sentimentale du moment (avec un mystère), l'autre partie concerne le reste des amis -en général Lili et Marschall- avec leur problème du moment (et comment il sera résolu).
Rarement, et cela donne les meilleurs épisode les deux problèmes se rejoignent à la fin (Comme quand Ted veut savoir d’où vient Victoria, séduite lors d'un mariage, et que Marschall veut juste savoir d’où viennent les gâteaux servi lors de ce mariage)
Pour écrire, il faut se rappeler que le suspens s'entretient bien plus facilement, si plusieurs problèmes se posent simultanément. Avec deux ou trois histoires parallèles , on peut faire des révélations à intervalle plus court. Idéalement tout se rejoins à la fin, mais c'est plus difficile à produire.




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire